Tout d’abord, le décret assouplit significativement les conditions d’accès des patients à la télémédecine. En effet, il abolit les deux conditions préalables d’accès à la téléconsultation nécessaires avant la crise pour bénéficier d’un remboursement par l’assurance-maladie : d’une part, la téléconsultation sera possible même si le praticien réalisant la consultation n’est pas le médecin traitant2 du patient et qu’il s’agit donc d’une première consultation avec le professionnel de santé ; d’autre part, il ne sera plus nécessaire d'avoir eu une consultation en présentiel avec le professionnel de santé dans les douze mois précédant la consultation à distance.
La téléconsultation ne s’inscrit donc désormais plus dans un « parcours continu de soin », prévu et recommandé par exemple pour les patients atteints de maladie chronique, mais répond bien ici à une situation d’urgence, puisque tous les patients ne disposant pas de médecin traitant ou dont le médecin traitant n’est pas disponible dans les délais compatibles avec leur état de santé, pourront en bénéficier.
Par ailleurs et surtout, concernant les moyens de téléconsultation utilisés, le décret permet pour la première fois l’utilisation de toute plateforme permettant la communication vidéo. Il est en effet indiqué que les professionnels de santé auront la possibilité d’utiliser « n'importe lequel des moyens technologiques actuellement disponibles pour réaliser une vidéotransmission » pour des patients atteints ou potentiellement infectés par le Covid-19.
Cette mesure constitue un assouplissement considérable – et inédit – de la position prise par la Caisse Nationale de l’Assurance Maladie en septembre 2018 qui indiquait que si si les outils de communication vidéos existants sur le marché tels que Skype ou Facetime apparaissent suffisamment sécurisés pour l’échange vidéo avec le patient lorsqu’il est connu, ils ne remplissaient toutefois pas les conditions de sécurité suffisantes pour les échanges de documents médicaux.
Désormais, dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, l’utilisation de tout moyen technologique est ainsi possible et considérée comme une solution complète couvrant même les échanges de documents médicaux, telles que photos, diagnostics au test du COVID-19 ou certificats médicaux avec des patients jusqu’alors inconnus du professionnel de santé.
L’extension de la téléconsultation à toutes les plateformes de communication répond bien évidemment ici à un objectif immédiat de protection de la santé dans des circonstances exceptionnelles. Cependant, ces nouvelles règles suscitent des interrogations concernant le traitement des données de santé ainsi échangées entre le médecin et le patient. En effet, si l’assouplissement des règles encadrant la téléconsultation semble favorablement accueilli par le corps médical car la téléconsultation peut faciliter considérablement la prise en charge des patients n’ayant pas développé une forme grave du Covid-19, il n’est pas exclu que l’usage de toute plateforme numérique devienne in fine systématique dans la pratique des téléconsultations une fois la pandémie passée. Il est vrai que la CNIL n’a pas été consultée avant la publication du Décret, et il n’est pas exclu que cette dernière intervienne a posteriori afin de s’assurer que les traitements de données mis en œuvre respectent le cadre juridique de protection des données à caractère personnel si cette pratique perdure dans le temps. Mais l’assouplissement ainsi engagé montre qu’il est possible de faire autrement, et plus simple. Il répond à un besoin exprimé depuis longtemps. Il n’est pas sûr qu’une marche arrière soit possible, ce qui bouleverserait alors la donne en matière de télémédecine et de MedTech plus généralement.
- Décret N° 2020-227 du 9 mars 2020 adaptant les conditions du bénéficie des prestations en espèces d’assurance maladie et de prise en charge des actes de télémédecine pour les patients atteints du Covid-19.
- En France, le médecin traitent est celui qui coordonne l’ensemble des soins reçus par son patient et l’oriente si nécessaire vers un médecin spécialiste.
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